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Soumis par IdeoLegis le lun 24/02/2020 - 21:26
Finance de marché
Droit des marchés financiers

Le titre au porteur identifiable (TPI) est une procédure optionnelle qui permet à un émetteur de prendre connaissance de l’identité et du nombre de titres détenus par ses investisseurs détenteurs de titres au porteur.

La procédure est ainsi le pendant « au porteur »  du système de la circulation des BRN pour les actions nominatives. Toutefois, les particularités des titres au porteur rendent ces deux mécanismes complètement différents, tant en ce qui concerne l’objectif poursuivi que dans le cadre de sa mise en oeuvre technique.

 

Quelle est l’utilité du TPI ? 

Le détenteur d’une action au porteur n’est pas identifié sur les registres de la société mais uniquement au niveau de l’intermédiaire financier (teneur de comptes) auprès duquel il a ouvert un compte-titres. 

Ce mode de détention est celui qui facilite le plus la circulation des titres cotés. Lorsque l’action change de main, l’identité de l’acquéreur n’est pas connue par l’émetteur. En principe il n’y a aucune opération back-office à effectuer au niveau de l’émetteur ou de son mandataire financier. 

Seuls les différents franchissement de seuils réglementaires permettent à un émetteur de prendre connaissance des nouveaux actionnaires significatifs, car l'actionnaire en question est alors contraint de déclarer un tel franchissement. 

En dehors de cette hypothèse, seul le TPI permet de prendre connaissance de son actionnariat « au porteur ». L’émetteur y aura recours pour diverses raisons. 

 

Quelles sont les possibles motivations du TPI ? 

Tout d’abord, l’émetteur peut vouloir se prémunir contre les prises de participation rampantes de la part d’actionnaires qui vont multiplier les acquisitions au porteur auprès de plusieurs intermédiaires financiers en vue de surprendre le management de l’entreprise avec une offre publique. 

L’Association française des entreprises privées (l’AFEP) a publié décembre 2019 un fascicule sur l’activisme actionnarial qui recommande aux entreprises côtées de réaliser un TPI deux fois par an pour « anticiper en période de croisière » (Association française des entreprises privées, « Activisme actionnarial », Décembre 2019). 

En outre, l’émetteur peut s’intéresser, en dehors de ces considérations, à son actionnariat pour analyser la composition du capital et sa typologie. Ici, l’enjeu est d’adapter sa communication pour mieux satisfaire certains actionnaires ou encore favoriser l’obtention du quorum aux assemblées générales. 

 

Régime juridique du TPI

Tout comme le BRN, le TPI a été lancé par la loi n°87-416 du 17 juin 1987 sur l’épargne. Désormais prévu à l’article L 228-2 du Code de commerce, le dispositif précise que le TPI doit être autorisé dans les statuts dès le premier alinéa. Toutefois, « pour les actions admises aux négociations sur un marché réglementé, cette faculté est de droit ». 

Sous cette réserve, l’émetteur, qu’il soit de droit privé ou public, peut interroger soit le dépositaire central de la place de marché en cause, soit directement les teneurs de comptes. 

La demande de TPI est transmise aux teneurs de compte concernés, qui eux-même doivent transmettre une demande s’ils constatent que certains des détenteurs sont eux-mêmes des intermédiaires financiers agissant pour le compte d’un ou plusieurs tiers propriétaires. 

Cette transmission entre teneurs de comptes permet d’élucider l’actionnariat éventuellement masqué par une foule d’intermédiaires. La transmission à ce détenteur de second niveau intervient sauf opposition expresse de la société émettrice ou de son mandataire qui veillera à le spécifier lors de la demande de TPI. 

En cas de non respect des délais ou lorsque les informations sont erronées, tout acteur impliqué dans la procédure (dépositaire central, émetteur ou son mandataire, teneur de compte) peut demander l’exécution de l’obligation de communication sous astreinte par la voie d’un référé. 


 

Fonctionnement du TPI 

Du cadre légal et réglementaire, il ressort que la demande adressée au dépositaire central doit être transmise au plus tard un jour ouvrable à compter de sa réception aux teneurs de comptes qui lui sont affiliés. 

Les teneurs de comptes ont jusqu’à 10 jours ouvrables pour retourner les informations pertinentes. A réception de la réponse, le dépositaire central à 5 jours ouvrables pour retourner les informations. 

La difficulté liée à l’intercalage dans le processus d’un intermédiaire financier agissant pour le compte d’un ou plusieurs tiers, qui peut ralentir le TPI, est surmontée par un délai d’un jour ouvrable afin de contraindre le teneur de compte à transmettre rapidement la demande à l’intermédiaire concerné.

Dans le cadre d’un TPI via Euroclear France, la demande devra être formulée deux jours avant la date d’arrêté. La demande doit impérativement comporter le code ISIN du titre ainsi que la date d’arrêté choisie (la date de photographie). 

 

Informations remontées par le TPI

Les informations à retourner sont précisées par voie réglementaire depuis le Décret n°2019-1235 du 27 novembre 2019 transposant la directive 2007/36/CE du 17 mai 2017.

Actuellement, il s’agit du nom ou de la dénomination social du propriétaire du titre, son année de naissance ou son année de constitution, sa nationalité, son adresse postale et électronique, le nombre de titres détenus ainsi que les restrictions dont les titres peuvent être frappés. 

Des informations additionnelles peuvent être demandées si le teneur de compte ou l’intermédiaire interrogé en dispose, comme le numéro d’immatriculation de la personne morale ou à défaut son identifiant d’entité juridique (LEI), ou encore l’identifiant national lorsque le propriétaire est une personne physique. L'émetteur ou son mandataire pourra se référer à l’article R 228-3 du Code de commerce pour une liste complète des informations concernées par le TPI. 
 

Limite du TPI: 

Le TPI est encadré par des délais légaux de 10 jours ouvrés à compter de la réception de la demande de TPI. Or, un groupe de travail dans le cadre de l’initiative transparence a préconisé une norme en J+6 pour le délai maximal de retour des teneurs de comptes. 

Par ailleurs, ce groupe de travail critique le délai de réponse des intermédiaires de deuxième niveau, fixé à 10 jours. Si la composition des titres au porteur est très intermédiée, les délais entre la date d’arrêté («photographie») et la date où les informations sont effectivement remontées risquent d’être particulièrement longs, ce qui atténue la valeur du TPI. 

De surcroît, l’Association nationale des sociétés par actions (ANSA) rappelle que l’actionnariat étranger des sociétés cotés ne peut pas être complètement élucidée par la procédure du TPI, dans la mesure où seul le nom du dépositaire étranger est retourné, sans que soit identifié l’actionnaire final. 

 

Coûts du TPI

Enfin, des coûts plus ou moins importants peuvent dissuader certaines entreprises de recourir au TPI. L’article L228-2 rappelle toutefois que les tarifs pratiqués en cas de TPI doivent être «non discriminatoires » et «proportionnés aux coûts engagés pour fournir ces services». 

En pratique, Euroclear pratique une tarification en coût fixe assorti d’un variable. Les frais fixes s’élèvent actuellement à 1800 € et 2000 € H/T et de deux centimes par détenteurs identifiés. 

Cependant, une facturation de coûts par intermédiaires impliqués qu’Euroclear doit reverser à ces-derniers vient s’ajouter au coût total du TPI: Jusqu’à 145 euros par intermédiaire et jusqu’à 345 euros lorsque cet intermédiaire est une banque de détail. 

Cette tarification nous paraît toutefois répondre aux exigences légales d’un tarif non discriminatoire, notamment dans la mesure où une distinction est réalisée entre les émetteurs dont la masse des titres au porteur est inférieure à 1 milliard d’euros et ceux qui franchissent ce seuil. 

Les entreprises cotées de taille modeste ont par ailleurs plus de chance d’avoir un actionnariat moins fragmenté et donc de supporter des coûts de TPI moins importants.